"El Místico", de Santiago Rusiñol - Persée
- ️Mérimée, Ernest
- ️Fri May 13 2016
VARIÉTÉS
«El Místico1,» de Santiago Rusiïïol.
Parmi les pièces nouvellement représentées sur les théâtres de Madrid et qui méritent de retenir l'attention, le drame intitulé Le Mystique, de Rusiñol, a été pour le grand public une révélation. Le succès de la pièce n'avait pas été douteux lorsqu'elle fut représentée dans sa langue originale; mais, sous cette forme, accessible seulement au petit nombre, sa renommée ne pouvait guère s'étendre au delà des limites géographiques de cette langue elle-même. Elle reçoit maintenant la consécration de la capitale, qu'elle a conquise, ce qui ne peut que flatter le plus farouche des catalanistes. Elle a eu, d'ailleurs, la double bonne fortune d'être excellemment traduite par Dicenta, l'auteur de Juan José, l'un des plus beaux succès du théâtre contemporain, et interprétée par deux des meilleurs acteurs de l'Espagne, Borras et Rosario Pino.
C'est un nouveau triomphe à l'actif des dramaturges catalans, lesquels, décidément, forment une école, d'inspirations certes fort diverses, mais remarquable par des qualités de force, de netteté, de rapidité relativement rares au pays de Lope et d'Echegaray. Il faut se garder de généralisations précipitées; cependant, en songeant aux Guimerâ, aux Feliú y Codina, aux Santiago Rusiñol et à tant d'autres, on croirait volontiers que cette race, au parler net, bref et franc, amie de l'action et faite pour les réalités vivantes, est destinée, lorsqu'elle s'applique à la création littéraire, à réussir particulièrement au théâtre.
Il est vrai que le titre comme le sujet de la pièce semblent au premier abord contredire l'idée qu'on se fait du génie catalan : El Místico! C'est dans les mornes solitudes des plaines castillanes que nous nous attendrions à voir s'épanouir la fleur mystique, plutôt que dans l'active, industrieuse et enfiévrée Catalogne. Mais que cette union du rêve et de l'action ne nous étonne point; chez certaines races, ils s'appellent et s'attirent en s'opposant. Ce fut au siècle des plus aventureuses entreprises que les couvents se multiplièrent et
i. Drame en 4 actes, en prose, traduit du catalan de Santiago Rusiñol par Joaquín Dicenta, et représenté au théâtre de la Comedia, à Madrid, le 3 décembre 1904.