ODDON, Yvonne
- ️Antonutti, Isabelle
p. 199-202
Texte intégral
Elle crée la bibliothèque du musée de l’Homme. Membre fondatrice d’un des premiers réseaux de Résistance, arrêtée, elle est déportée à Ravensbrück. Tout au long de sa carrière, elle déploie une intense activité associative en France et à l’international.
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© MNHN-DBD.
1Elle est issue d’une famille protestante, son père, officier de carrière, décède en 1920. Elle obtient son baccalauréat au lycée de Versailles puis séjourne un an au Pays de Galles en 1922. Elle étudie à l'École des bibliothécaires (rue de l'Élysée) où elle obtient une bourse à la bibliothèque de l’université du Michigan aux États-Unis. À son retour, elle publie un article dans la Revue des bibliothèques en 1928 (n° 1) qui débute ainsi : « Il faut avoir visité quelque grande université américaine […] et avoir vécu dans cette atmosphère de vie intense et coordonnée, pour saisir toute l'importance, qu'y prend la bibliothèque. ». Elle rapporte une abondante documentation qu’elle communique à son amie Victorine Vérine et à l'École des bibliothécaires où elle travaille comme secrétaire. Mise en relation avec Georges-Henri Rivière, chargé de recruter un bibliothécaire pour le musée du Trocadéro, elle prend son poste le 1er janvier 1929 dans un grenier sans chauffage qui regroupe quelques milliers d'ouvrages non catalogués et entassés dans des armoires. En 1934, la fondation Rockefeller lui offre un voyage d'étude aux États-Unis durant lequel elle visite les bibliothèques des universités de Columbia, de Boston, et de Washington. En France, le projet du musée de l’Homme prend alors tournure, Paul Rivet, le directeur, voulant en faire un « établissement d’enseignement populaire ». À son retour, elle collabore activement au projet. S’intéressant largement aux avancées professionnelles, elle figure parmi les membres fondateurs de l’ADLP et est responsable de la section bibliothèques lors de l’exposition universelle. En 1937, la nouvelle bibliothèque « spécialisée-publique », une exception dans le paysage culturel, ouvre ; accessible aux chercheurs mais aussi à tous les publics, elle adopte le libre accès, une classification inspirée de la Library of Congress et propose une photothèque.
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Yvonne Oddon sur la terrasse de l’ancien Palais du Trocadéro, vers 1930.
Photo © Musée du quai Branly - Jacques Chirac - Dist. RMN-Grand Palais / image musée du quai Branly - Jacques Chirac
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Équipe du Musée d'Éthnographie du Trocadéro en 1936-1937. De gauche à droite : en bas, Anatole Lewitsky et Yvonne Oddon ; en haut, Roger Falk, Deborah Lifschitz, Denise Allègre, Joubier dite « Joubinette » et Louis Dumont (1911 - 1998) Date de prise de vue : 1936-1937.
Photo © Musée du quai Branly - Jacques Chirac - Dist. RMN-Grand Palais / image musée du quai Branly - Jacques Chirac
2Yvonne Oddon reste une figure marquante de la Résistance car elle est à l'origine du réseau du musée de l'Homme avec Boris Vildé, linguiste, et Anatole Lewitzky, chercheur, son concubin depuis 1936. Pour lutter contre la propagande nazie, ils publient le journal Résistance avant d’être dénoncés et arrêtés le 10 février 1941 par la Gestapo. 19 membres sont traduits devant une cour militaire, 7 sont condamnés à mort. L’exécution d’Yvonne Oddon est suspendue puis elle est déportée au camp de Ravensbrück. Elle revient le 22 avril 1945.
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De gauche à droite : Yvonne Oddon et Paule Barret-Reichlen dans la bibliothèque D3 en décembre 1929.
Photo © Musée du quai Branly - Jacques Chirac - Dist. RMN-Grand Palais / image musée du quai Branly - Jacques Chirac
3Elle retrouve en 1946 son poste et sa collègue Denise Allègre. Titularisée avec effet rétroactif à 1941, elle y reste jusqu’à sa retraite en 1964. La bibliothèque du musée de l’Homme conserve sa modernité, elle est visitée régulièrement par les collègues en charge de projet d’aménagement. Elle reprend rapidement son action militante professionnelle. En 1946, elle entre au bureau de l'ABF, comme secrétaire générale adjointe. Avec Maurice Caillet, elle participe à la création de l’Association pour la lecture populaire et met en route une bibliothèque tournante dans sa région natale du Diois (Vercors). Avec Charles-Henri Bach, elle écrit le Petit guide du bibliothécaire en 1931. Ce manuel de bibliothéconomie, appelé le Bach-Oddon, est destiné aux agents sans formation exerçant dans des petites structures ; il est réédité jusqu’en 1964.
4À partir de 1947, elle assure à mi-temps la direction du centre de documentation muséographique (futur Conseil international des musées) de l'Unesco, et est chargée de la publication bilingue Icom News/Bulletin de l’Icom. Elle anime des missions, comme à Haïti où elle étudie les moyens de lutter contre l’analphabétisme. À la retraite, elle poursuit son action au service des musées dans les pays africains, toujours avec l’Unesco, elle crée un centre de formation de techniciens de musée au Nigeria.
5Depuis son retour de déportation, elle participe de façon active à l’Association des anciennes déportées et internées de la Résistance. Sa ténacité et son militantisme sont largement honorés : elle reçoit la Croix de guerre avec palmes, la médaille de la Résistance, et est promue commandeur de la Légion d’honneur en 1980. Sa mémoire est commémorée dans différents lieux. Une plaque rappelle son action à la médiathèque de Die (Drôme) et la nouvelle bibliothèque du musée de l’Homme porte son nom.
ISNI
0000 0001 1877 5718
Sources primaires et bibliographie
Muséum national d’histoire naturelle, Fonds Yvonne Oddon ;
Arch. BDIC, Fonds ADIR ;
Blanckaert, 2015 ;
Cuypers, 1983 ;
Dubois et Poux, 1988 ;
Mnich, 2016 ;
Pavillard, Le Maitron, 2013 ;
Pavillard et al., 2002 ;
Poujol et Romer, Dictionnaire biographique des militants..., 1996
Weil, 1982a, 1982b, 2009.
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MONDAIN-MONVAL Georges, MONDAIN-MONVAL Jean, MONDAIN-MONVAL Madeleine
MONDAIN-MONVAL, Georges Avon (1er avril 1845 – Paris, 28 juin 1910), MONDAIN-MONVAL Jean (Paris, 9 mai 1882 – Paris, le 22 décembre 1942), MONVAL-HORN, Madeleine (Paris, 26 mars 1886 – Herblay, le 3 février 1972)
Isabelle Antonutti
LEMAÎTRE Henri et LEMAÎTRE Renée
LEMAÎTRE Henri (Valenciennes, 24 février 1881– Sceaux, 8 novembre 1946) et LEMAÎTRE Renée (Teddington (Angleterre), 4 août 1918 – Nanterre, 22 février 2008)
Isabelle Antonutti
HAHN, François Louis, HAHN, Victor-Lucien, HAHN, André-Alfred
HAHN, François Louis (Strasbourg, 16 décembre 1844 – Saint-Denis d'Oléron, 20 décembre 1921), HAHN, Victor-Lucien (Batna (Algérie), 16 septembre 1872 – Paris, 2 septembre 1942), HAHN, André-Alfred (Paris, 30 juillet 1900 – Paris, 31 août 1975)
Isabelle Antonutti
MONDAIN-MONVAL Georges, MONDAIN-MONVAL Jean, MONDAIN-MONVAL Madeleine
MONDAIN-MONVAL, Georges Avon (1er avril 1845 – Paris, 28 juin 1910), MONDAIN-MONVAL Jean (Paris, 9 mai 1882 – Paris, le 22 décembre 1942), MONVAL-HORN, Madeleine (Paris, 26 mars 1886 – Herblay, le 3 février 1972)
Isabelle Antonutti
LEMAÎTRE Henri et LEMAÎTRE Renée
LEMAÎTRE Henri (Valenciennes, 24 février 1881– Sceaux, 8 novembre 1946) et LEMAÎTRE Renée (Teddington (Angleterre), 4 août 1918 – Nanterre, 22 février 2008)
Isabelle Antonutti
HAHN, François Louis, HAHN, Victor-Lucien, HAHN, André-Alfred
HAHN, François Louis (Strasbourg, 16 décembre 1844 – Saint-Denis d'Oléron, 20 décembre 1921), HAHN, Victor-Lucien (Batna (Algérie), 16 septembre 1872 – Paris, 2 septembre 1942), HAHN, André-Alfred (Paris, 30 juillet 1900 – Paris, 31 août 1975)
Isabelle Antonutti