Le commerce du sel de Taoudeni - Persée
- ️Meunier, Dominique
- ️Tue Mar 29 2016
DOMINIQUE MEUNIER LE COMMERCE DU SEL DE TAOUDENI
Bien que le travail de Jean Clauzel (1960) ait épuisé le sujet en ce qui concerne les techniques de fabrication du sel, cette note a la seule ambition d'apporter une actualisation des taux d'échange du sel et une indication sur l'importance des caravanes depuis la publication du mémoire de Clauzel et après la sécheresse récente.
Nous avons donc rassemblé un certain nombre d'éléments, recueillis au cours de plusieurs voyages qui avaient pour but la cité de Taoudeni, métropole du sel saharien, située au nord de Tombouctou. Nos informations ne proviennent pas toutes de sources imprimées. Nous avons pu séjourner plusieurs fois dans cette partie du Sahara malien, à une époque qui conservait bien des aspects de la période antérieure. Il nous a donc suffit, dans beaucoup de cas, de regarder autour de nous pour reconstituer une réalité encore peu modifiée.
La documentation que nous n'avons pas puisée dans des ouvrages, a été recueillie soit par l'observation directe soit par l'intermédiaire de divers informateurs. Chaque fois qu'une enquête a provoqué les témoignages différents d'une famille ou d'une tribu, nous le signalons.
Taoudeni, métropole du sel saharien, n'existerait pas sans Teghazza. Jusqu'à la fin du XVIème siècle, les pays du Moyen-Niger étaient approvisionnés en sel par Teghazza. En 1585, le roi Songhoï, dépossédé de ces salines par le Sultan du Maroc, se mit à exploiter Taoudeni. Les salines d'Ijjil, situées au nord-est du Rio de Oro et au sud-est de F'Derik, nommées Teghazza el-Rharbia ou Teghazza l'occidentale, alimentaient également en sel, à un degré moindre, une grande partie de l'Afrique.
A Teghazza, située dans une immense sebkha, étincelante de sel, on devine l'emplacement des exploitations qui ont bouleversé le sol au cours de plusieurs siècles d'activité : la terre hérissée de buttes d'argile et de blocs de pierre entassés, prend des aspects de banquise. Les ruines du village sont encore visibles, où l'on retrouve la place des édifices effectivement bâtis en brique de sel gemme : non seulement des bases de murs arasés, mais parfois même de véritables fragments d'architecture, comme des arcs de plein-cintre, ainsi que divers débris abondant sur le sol (tessons de poteries vernissées et peintes d'origine marocaine, objets de cuivre, perles, etc.).
A Taoudeni, dans une cuvette lacustre, à quelques mètres de profondeur, se superposent, séparées, par des couches stériles, plusieurs couches de sel gemme qui fournissent des plaques très dures, pouvant être, sans emballage, directement chargées sur les dromadaires. De vastes fosses carrées, taillées dans l'argile rouge et au fond desquelles croupit une saumure fétide, mettent à nu la surface des couches salines qui sont ensuite découpées à plat, soulevées, nettoyées de leur écorce granuleuse et friable de façon à n'en conserver que la
/. des Africanistes, 50, 2, (1980) pp. 133-144