Bombardement de l'OTAN sur la Yougoslavie — Wikipédia
- ️Wed Mar 24 1999
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L'opération Force alliée[1],[2] (en anglais : pour l'OTAN, Operation Allied Force, pour les États-Unis, Operation Noble Anvil) est une opération militaire de bombardement par l'OTAN de cibles serbes durant la guerre du Kosovo. Elle s'est déroulée du 23 mars au 10 juin 1999, à la suite du massacre de Račak. Cette intervention n'est pas autorisée par le Conseil de sécurité de l'ONU, malgré les demandes de pays de l'OTAN.
La campagne aérienne dure 78 jours, du 24 mars au 10 juin 1999, alors que le plan américain était de bombarder la Serbie de nuit avec des pauses en journée[3]. Le nombre de sorties aériennes nécessaires pour faire plier la République fédérale de Yougoslavie est de 37 465, soit 480 par jour en moyenne[4].
Les bombardements font entre 2000 et 3 000 morts[5].
L'opération de frappes aériennes est décidée le 22 mars 1999, après l'échec de la conférence de Rambouillet (6 février-19 mars 1999)[6]. Pour Noam Chomsky, cet échec découle notamment de l'exigence occidentale d'un droit de passage absolu pour les personnels et matériels de l'OTAN à travers la République fédérale de Yougoslavie, formulée dans l'Annexe B des accords de Rambouillet[7].

La cible déclarée de ces raids est le complexe militaro-industriel serbe et les centres du pouvoir de Slobodan Milošević.
Le 23 avril 1999, en début de matinée, les avions de l’OTAN bombardent les quartiers généraux et les studios de la Radio-Télévision d’État serbe (Radio Televizija Srbije, RTS), au centre de Belgrade, tuant au moins seize civils et en blessant grièvement seize autres[8].
Dans la nuit du 7 au 8 mai 1999, des bombardiers furtifs B-2, arrivés tout droit des États-Unis, larguent trois bombes auto-guidées sur le bâtiment neuf abritant la mission diplomatique chinoise[9].
Les pertes humaines non civiles du côté yougoslave seraient, selon les déclarations du gouvernement Miloševic en juin 1999, de 462 soldats tués et 199 blessés, ainsi que de 114 policiers tués[10],[11].
L'OTAN annonce un bilan matériel de 20 chars, 220 transports et 450 pièces d’artillerie de l'Armée de Yougoslavie détruits. Cependant, une enquête du magazine Newsweek publiée le 15 mai 2000, s’appuyant sur un rapport de l’Armée de l’air américaine, révèle que seuls 14 chars, sur les 600 que comptait l'armée yougoslave[12], 18 transports de troupes et 20 pièces d’artillerie yougoslaves ont été détruits et que le reste du bilan est constitué par les leurres utilisé par les forces yougoslaves. Cinq avions de combat MiG-29 et un J-22 Orao sont détruits en vol, plusieurs autres au sol. Les casernes, bases aériennes, et dépôts logistiques sont sérieusement endommagés ainsi que l'industrie pétrochimique et les réseaux de transport.
Le 27 mars 1999, un F-117A fut est par un missile anti-aérien S-125 au-dessus de la Serbie. Le pilote s'éjecte et est récupéré sain et sauf[13]. L'opérateur de la batterie de missiles serbe a déclaré avoir modifié et amélioré les caractéristiques de celle-ci (sans jamais en avoir apporté la moindre preuve) et disposait d'un radar plus puissant que celui d'origine qui aurait réussi à détecter l'avion furtif — qui volait dans de mauvaises conditions météorologiques augmentant sa signature — à 25 km[14]. L'OTAN a soupçonné les Forces armées serbes d'utiliser un radar passif, appareil peu coûteux qui utilise la réflexion des ondes radio et télé ambiantes, pour guider leurs missiles[15]. Les Serbes donnent une aile à la Russie, tandis que la campagne serbe est parcourue par des agents chinois qui rachètent aux paysans des débris de l'appareil, ce qui aurait aidé à la conception du Chengdu J-20, une allégation démentie par les autorités chinoises[16].
Une enquête de l'organisation non gouvernementale Human Rights Watch recense 90 incidents lors des bombardements, entraînant la mort de 489 à 528 civils. Environ deux tiers d'entre eux (303 à 352) étaient des réfugiés albanais du Kosovo et il est conclu à une violation du droit international humanitaire[17],[18]. L'OTAN se défend en parlant de dommages collatéraux, elle n'en est pas moins vivement critiquée.
Les bombardements de l'OTAN tuent notamment 17 personnes à Aleksinac le 5 avril 1999, entre 14 et 60 passagers d'un train qui passait sur le pont de Grdelica le 12 avril, plus de 70 réfugiés kosovars le 14 avril près de Djakovica, 20 civils à Surdulica le 28 avril, 55 personnes à Lužane le 1er mai, au moins 15 civils à Niš le 7 mai (bombe à fragmentation), 87 civils albanais à Korisa en mai, 11 morts au moins sur le pont de Varvarin le 30 mai, 20 morts dans le bombardement du sanatorium de Surdulica le 31 mai, et 23 morts à Novi Pazar le même jour[19].
Le 23 avril 1999, le bombardement de l'immeuble de la RTS (Radio-télévision de Serbie) à Belgrade tue seize membres du personnel[20].
Le 7 mai, le bombardement de l'ambassade de Chine à Belgrade par les États-Unis tue trois journalistes chinois.
- Ce sont 37 465 missions aériennes sur ses 78 jours d’opération, qui ont été effectuées par un total de 786 aéronefs de l'OTAN[1] pendant lesquelles deux appareils américains furent perdus au combat (un F-117 Nighthawk et un F-16 Fighting Falcon) ; plus de 800 missiles sol-air ont été tirés par la DCA de l'Armée populaire yougoslave. On compte 8 676 missions offensives qui ont conduit au largage d'environ 23 000 munitions, 5 551 missions de défense aérienne et 4 397 missions SEAD anti-radar, le reste étant du soutien.
- Douze F-16 de la Composante air de l'armée belge présents à la base aérienne d'Amendola (en) ont effectué 679 sorties de combat et ont largué 279 bombes et missiles[21].
- Les forces aériennes françaises ont effectué environ 2 000 sorties durant ce conflit ; 420 missions ont permis le tir effectif de 988 bombes et missiles dont 49 furent largués au-dessus de la mer Adriatique par des Super-Étendard[22]. Les stocks de munitions air-sol de l'armée de l'air et de l'aéronautique navale françaises ont rapidement été insuffisants, notamment les bombes guidées par laser (BGL), ce qui a conduit à utiliser des bombes Paveway américaines en complément. Lorsque la configuration des cibles s'y prêtait (large surface à traiter, pas de risques collatéraux…), des bombes « lisses » non guidées de fabrication française ont été utilisées, l'insuffisance des stocks ayant, ici également, rendu nécessaire, en cours de campagne, l'acquisition de bombes américaines Mk82 de 250 kg. Au total 398 bombes lisses furent utilisées sur un total de 988 bombes et missiles largués[23].
- En outre, après enquête, les Américains admettent avoir utilisé plus de 30 000 projectiles à l’uranium appauvri radioactif au cours de l’opération. Les secteurs concernés par les frappes risquent d'être contaminés pour des milliers d'années, et il n’est pas exclu qu’il y ait des problèmes d'infiltration dans les nappes phréatiques[24].
D'après Jean-Christophe Buisson, rédacteur en chef au Figaro Magazine et essayiste, cette opération humanitaro-militaire violait plusieurs lois et conventions internationales — par exemple, l'article 2, alinéa 4 de la Charte des Nations unies qui prévoit que les membres doivent s'abstenir « dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l'emploi de la force, soit contre l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies[25] »[26].
Selon la Radio-télévision de Serbie, le 11 juin 2017, une équipe « spéciale » composée de médecins et d'avocats (serbes et étrangers) annonce son intention de porter plainte devant les tribunaux de chacun des 19 pays membres de l'OTAN qu'elle accuse d'avoir bombardé, en 1999, « principalement au Kosovo, mais aussi quatre endroits dans le Sud de la Serbie » sans autorisation légale et en violation des articles 5 et 6 des statuts de l'OTAN qui stipulent que l'OTAN n'est pas une structure offensive, mais défensive. L'équipe compte réunir les preuves démontrant que l'utilisation de bombes à sous-munitions et le bombardement des usines chimiques ou pétrochimiques a eu — à long terme — des conséquences sanitaires[27],[28],[29].
Le 18 mai 2021, le président de la Tchéquie, Miloš Zeman, sans pour autant révoquer la reconnaissance du Kosovo par la Tchéquie, est le premier dirigeant à présenter des excuses au peuple serbe pour les bombardements de 1999 : « La Serbie nous a exprimé son soutien et nous l'avons bombardée. Permettez-moi de dire immédiatement que je m'excuse pour le bombardement de la RFY. C'était une erreur. En tant qu'homme, je demande au peuple serbe de nous pardonner. Cela m'a tourmenté tout le temps », a-t-il dit en recevant le président serbe Aleksandar Vučić[30],[31],[32],[33].
- ↑ a et b « Les premiers enseignements de l'opération « force alliée » en Yougoslavie : quels enjeux diplomatiques et militaires ? », « Rapport d'information no 464 (1998-1999) de M. Xavier de Villepin, fait au nom de la commission des affaires étrangères du Sénat français, déposé le 30 juin 1999 ».
- ↑ « Human Rights Watch Publie le Bilan des Victimes Civiles Dans la Guerre du Kosovo », sur hrw.org via Wikiwix (consulté le 18 juin 2023).
- ↑ « SERBIE. Le bombardement de l'ambassade de Chine était-il délibéré ? », Courrier international, 25 novembre 2004 (lire en ligne, consulté le 23 août 2018)
- ↑ « 4 scénarios pour l'avenir de la Libye : « Kadhafi ne quittera la Libye que les pieds devant » », Le Post (consulté le 30 novembre 2015).
- ↑ « En Serbie, «le problème n’est pas tant dans la quantité d’armes en circulation, mais une "société malade"» », RFI, 7 mai 2023 (lire en ligne)
- ↑ Site de l'OTAN
- ↑ Noam Chomsky, Le nouvel humanisme militaire. Leçons du Kosovo, Cahiers libres - Éditions Page deux, 2000 (ISBN 2-940189-17-X), p. 160-161.
- ↑ Claudio Cordone & Avner Gidron, « L'attaque contre les studios de la télévision serbe », sur Le Monde diplomatique, 1er juillet 2000 (consulté le 9 janvier 2025)
- ↑ « Le bombardement de l'ambassade de Chine à Belgrade complique le jeu diplomatique - Les Echos » [archive du 24 août 2018], sur www.lesechos.fr (consulté le 9 janvier 2025)
- ↑ (en) « Milosevic proclaims victory with end to Kosovo conflict », CNN, 10 juin 1999.
- ↑ Heike Krieger, The Kosovo conflict and international law, Cambridge University Press, 2001 (ISBN 0521800714).
- ↑ « Editions du Cygne - L’ingérence de l'OTAN en Serbie », sur www.editionsducygne.com (consulté le 19 août 2022)
- ↑ « Vega 31: The loss of F-117A #82-806 », sur www.f-117a.com (consulté le 9 janvier 2025)
- ↑ (ro) « Doborarea invizibilului F117 : strategie stralucita,un P18 inovator sau pur noroc ? », sur Suntem Romania, 8 mai 2013 (consulté le 18 mai 2013).
- ↑ Serge Courrier, « Radars invisibles contre objets furtifs », 01.net, 24 novembre 2003 (consulté le 27 mars 2009).
- ↑ Arnaud de La Grange, « L'avion furtif chinois serait inspiré du F-117 américain », sur Le Figaro, 25 janvier 2011 (consulté le 12 juin 2017).
- ↑ « Civilian Deaths in the NATO Air Campaign - The Crisis in Kosovo », sur www.hrw.org (consulté le 9 janvier 2025)
- ↑ « Human Rights Watch Publie le Bilan des Victimes Civiles Dans la Guerre du Kosovo », Human Rights Watch (consulté le 30 novembre 2015).
- ↑ « Les "erreurs" de l'OTAN lors des bombardements », sur L'Obs, 19 février 2002 (consulté le 2 mai 2022)
- ↑ « Pas de justice pour les victimes des bombardements de l'OTAN », sur Amnesty International, 23 avril 2009 (consulté le 2 mai 2022)
- ↑ « Les F-16 belges au Kosovo : une facture de 474 millions », Le Soir, 21 janvier 2000 (consulté le 19 septembre 2011).
- ↑ Jean-Michel Boucheron, « Rapport d’information n° 1775 déposé par la commission des finances, de l’économie générale et du plan sur le coût de la participation de la France aux opérations menées en vue du règlement de la crise au Kosovo », Assemblée nationale (consulté le 19 septembre 2011).
- ↑ RAIDS (hors-série no 33), les ailes françaises au combat, 1994-2009.
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- ↑ « Charte des Nations unies : Chapitre I : buts et principes », sur un.org (consulté le 8 octobre 2017).
- ↑ Jean-Christophe Buisson, « Belgrade : 15 ans après le bombardement, les Serbes n'oublient pas », Le Figaro (consulté le 30 novembre 2015).
- ↑ (sr) « Tužba protiv NATO za bombardovanje », sur danas.rs, 11 juin 2017.
- ↑ « BOMBARDOVANJE SRBIJE Nakon 18 godina priprema se tužba protiv 19 članica NATO-a », sur blic.rs, 11 juin 2017 (consulté le 12 juin 2017).
- ↑ (sr) « RTS: Lekari i advokati spremaju tužbu za NATO bombardovanje », sur n1info.com (consulté le 12 juin 2017).
- ↑ RTS, Radio televizija Srbije, Radio Television of Serbia, « Земан: Извињавам се за бомбардовање СРЈ и молим српски народ да нам опрости », sur www.rts.rs (consulté le 18 mai 2021)
- ↑ (sr) « Zeman objasnio: Zašto se izvinio srpskom narodu? », sur B92.net (consulté le 18 mai 2021)
- ↑ (en) « "Let me say first: I apologize for the bombing"; "Nobody said that, thank you" VIDEO », sur B92.net (consulté le 18 mai 2021)
- ↑ « La République-Tchèque s'excuse pour les frappes de l'Otan en 1999 contre la Yougoslavie », sur SudOuest.fr (consulté le 19 mai 2021)