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Éléments propres (algèbre linéaire) — Wikipédia

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La matrice {\displaystyle \left({\begin{smallmatrix}2&1\\1&2\end{smallmatrix}}\right)} a deux directions propres : elle multiplie par 3 les vecteurs colinéaires à {\displaystyle \left({\begin{smallmatrix}1\\1\end{smallmatrix}}\right)} (en bleu) et par 1 ceux colinéaires à {\displaystyle \left({\begin{smallmatrix}1\\-1\end{smallmatrix}}\right)} (en rose). Elle modifie la direction des autres vecteurs (en rouge).

Les notions de vecteur propre, de valeur propre, et de sous-espace propre s'appliquent à des endomorphismes (ou opérateurs linéaires), c'est-à-dire des applications linéaires d'un espace vectoriel dans lui-même. Elles sont intimement liées, et forment un pilier de la réduction des endomorphismes, partie de l'algèbre linéaire qui vise à décomposer de la manière la plus efficace possible l'espace en somme directe de sous-espaces stables.

Dans toute la suite, on considère un espace vectoriel {\displaystyle E}, sur un corps commutatif {\displaystyle K}. Les éléments de {\displaystyle E} sont les vecteurs et ceux de {\displaystyle K} sont les scalaires. En pratique, le corps {\displaystyle K} est souvent le corps {\displaystyle \mathbb {C} } des complexes et l'espace vectoriel est de dimension finie. On précisera dans chaque section, les restrictions éventuelles sur le corps ou la dimension. On notera {\displaystyle u} un endomorphisme de {\displaystyle E} et {\displaystyle \mathrm {Id} } l'endomorphisme identité.

Les valeurs propres d'une matrice carrée {\displaystyle A} de taille {\displaystyle n} sont les valeurs propres de l'endomorphisme de {\displaystyle K^{n}} de matrice {\displaystyle A} dans la base canonique.

Si {\displaystyle E} est de dimension finie {\displaystyle n}, les valeurs propres de {\displaystyle u} (ou de sa matrice {\displaystyle A} dans n'importe quelle base) :

Exemples :

Définition[1] — Soit {\displaystyle x} un vecteur non nul de {\displaystyle E}, {\displaystyle x} est un vecteur propre de {\displaystyle u} s'il existe un scalaire {\displaystyle \lambda } tel que {\displaystyle u(x)=\lambda x}. On dit que {\displaystyle x} est un vecteur propre associé à la valeur propre {\displaystyle \lambda }.

Les vecteurs propres (associés à une valeur propre {\displaystyle \lambda }) d'une matrice carrée {\displaystyle A} de taille {\displaystyle n} sont les vecteurs propres (associés à la valeur propre {\displaystyle \lambda }) de l'endomorphisme de {\displaystyle K^{n}} représenté par {\displaystyle A}.

Définition[1] — Soit {\displaystyle \lambda } une valeur propre de {\displaystyle u} (resp. {\displaystyle A}) ; alors l'ensemble constitué des vecteurs propres pour la valeur propre {\displaystyle \lambda } et du vecteur nul est appelé le sous-espace propre de {\displaystyle u} (resp. {\displaystyle A}) associé à la valeur propre {\displaystyle \lambda }.

On suppose ici que {\displaystyle E} est de dimension finie {\displaystyle n}.

On appelle « polynôme caractéristique » de l'endomorphisme {\displaystyle u}, le polynôme {\displaystyle \det(X\mathrm {Id} -u)}, et « polynôme caractéristique » d'une matrice carrée {\displaystyle A} d'ordre {\displaystyle n}, le polynôme caractéristique de l'endomorphisme de {\displaystyle K^{n}} canoniquement associé à {\displaystyle A}, c'est-à-dire le polynôme {\displaystyle \det(XI_{n}-u)}, où {\displaystyle I_{n}} est la matrice identité {\displaystyle n\times n}. Ce polynôme est de degré {\displaystyle n}, donc a au plus {\displaystyle n} racines[4].

L'ordre de multiplicité algébrique d'une valeur propre {\displaystyle \lambda } est l'ordre de multiplicité de la racine dans le polynôme caractéristique[7]. C'est donc l'exposant de {\displaystyle (X-\lambda )} dans le polynôme caractéristique.

  • Dans un corps algébriquement clos :
    • Le déterminant est égal au produit des valeurs propres élevées à leur ordre de multiplicité algébrique ;
    • La trace est égale à la somme des valeurs propres multipliées par leur ordre de multiplicité algébrique.

On se place ici dans le cadre d'un espace vectoriel {\displaystyle E} de dimension finie.

On appelle « polynôme minimal » de {\displaystyle u} le polynôme unitaire de plus petit degré qui annule {\displaystyle u}[8]. Le polynôme minimal donne une relation de dépendance linéaire sur les puissances {\displaystyle u^{0},u^{1},u^{2},\dots }, de l'endomorphisme, et réciproquement une telle relation de dépendance linéaire fournit un polynôme annulateur de {\displaystyle u}, le polynôme minimal en minimisant le degré et en prenant le coefficient 1 pour la plus grande puissance de {\displaystyle u} qui intervient.

  • Les racines du polynôme minimal sont les valeurs propres de {\displaystyle u}[9].
Si le polynôme minimal se factorise {\displaystyle M=(X-\lambda )Q}, alors {\displaystyle M(u)=(u-\lambda \mathrm {Id} )\circ Q(u)} est l'endomorphisme nul, alors que {\displaystyle Q(u)} ne l'est pas (car le degré de {\displaystyle Q} est trop bas). Par conséquent il existe des vecteurs non nuls dans l'image de {\displaystyle Q(u)}, qui sont des vecteurs propres pour {\displaystyle \lambda }.
  • Plus généralement pour tout entier {\displaystyle i\geq 1}, le polynôme minimal est divisible par {\displaystyle (X-\lambda )^{i}} si et seulement si le noyau de {\displaystyle (u-\lambda \mathrm {Id} )^{i}} est strictement plus grand que celui de {\displaystyle (u-\lambda \mathrm {Id} )^{i-1}}. Par conséquent, la multiplicité {\displaystyle m} de {\displaystyle \lambda } comme racine du polynôme minimal est égale au plus petit exposant tel que le noyau de {\displaystyle (u-\lambda \mathrm {Id} )^{m}} soit égal au sous-espace caractéristique associé à la valeur propre {\displaystyle \lambda }. On l’appelle multiplicité minimale de {\displaystyle \lambda }[réf. nécessaire].
  • Soit a un automorphisme de {\displaystyle E}, alors {\displaystyle u} et {\displaystyle aua^{-1}} ont même polynôme minimal (et donc mêmes valeurs propres). Autrement dit le polynôme minimal est un invariant de similitude de l'endomorphisme[réf. nécessaire].
    En effet, {\displaystyle P(aua^{-1})} est égal à {\displaystyle aP(u)a^{-1}}, pour tout polynôme {\displaystyle P}.
  • Sur un corps algébriquement clos, le polynôme minimal (comme tout polynôme non nul) est scindé, et possède donc au moins une racine, qui est valeur propre de {\displaystyle u} (exception : si la dimension de E est nulle, le polynôme minimal est 1, tout comme le polynôme caractéristique, et {\displaystyle u} n'a pas de valeur propre).
  • Le théorème de Cayley-Hamilton permet d'affirmer que le polynôme minimal divise le polynôme caractéristique.

On suppose que {\displaystyle E} est de dimension finie et que {\displaystyle K} est algébriquement clos.

Si {\displaystyle \lambda } est une valeur propre de {\displaystyle u}, dont l'ordre de multiplicité est {\displaystyle \alpha _{\lambda }}, on appelle « sous-espace caractéristique » de {\displaystyle u} associé à la valeur propre {\displaystyle \lambda } le noyau de {\displaystyle (u-\lambda \mathrm {Id} )^{\alpha _{\lambda }}}. On notera ce sous-espace caractéristique {\displaystyle E_{\lambda }}.

On suppose que {\displaystyle E} est de dimension finie. L'étude des valeurs propres permet de trouver une forme plus simple des endomorphismes, c'est ce qu'on appelle leur réduction.

L'endomorphisme est entièrement déterminé par ses vecteurs propres et ses valeurs propres associées s'il est diagonalisable, c'est-à-dire s'il existe une base de vecteurs propres. Des exemples numériques sont donnés dans l'article « Matrice diagonalisable ». Les critères suivants sont tous des conditions nécessaires et suffisantes pour qu'un endomorphisme d'un espace vectoriel de dimension finie soit diagonalisable :

À ces propriétés équivalentes s'ajoutent les implications suivantes :

Dans le cas où le corps est {\displaystyle \mathbb {C} }, cette propriété est presque partout vraie au sens de la mesure de Lebesgue. De plus, dans l'espace topologique des endomorphismes de {\displaystyle E} , le sous-ensemble de ceux qui sont diagonalisables est alors dense.

Si le polynôme minimal de {\displaystyle u} est scindé, alors {\displaystyle u} peut s'écrire sous la forme {\displaystyle u=d+n} avec {\displaystyle d} diagonalisable et {\displaystyle n} nilpotent tels que {\displaystyle dn=nd}. De plus, {\displaystyle d} et {\displaystyle n} sont des polynômes en {\displaystyle u}.

On suppose que {\displaystyle K} est algébriquement clos.

La représentation de Jordan prouve qu'alors, tout endomorphisme {\displaystyle u} de {\displaystyle E} est trigonalisable. Elle démontre que la restriction de {\displaystyle u} au sous-espace caractéristique associé à la valeur propre {\displaystyle \lambda } possède une représentation formée de blocs de la forme

{\displaystyle J_{k}(\lambda )={\begin{pmatrix}\lambda &1&&&&\\&\lambda &1&&(0)&\\&&\ddots &\ddots &&\\&&&\ddots &\ddots &\\&(0)&&&\lambda &1\\&&&&&\lambda \\\end{pmatrix}}}

appelés « blocs de Jordan » et que l'endomorphisme possède une représentation matricielle sous la forme

{\displaystyle {\begin{pmatrix}J_{k_{1}}(\lambda _{1})&&&&\\&J_{k_{2}}(\lambda _{2})&&&\\&&\ddots &&\\&&&\ddots &\\&&&&J_{k_{r}}(\lambda _{r})\\\end{pmatrix}}}

où les scalaires {\displaystyle \lambda _{i}} (non nécessairement distincts) sont les valeurs propres de {\displaystyle u}.

  1. a b et c Mansuy et Mneimné 2022, 1.1 Définition, p. 51.
  2. Mansuy et Mneimné 2022, 1.2 Proposition, p. 51.
  3. Mansuy et Mneimné 2022, 1.6 Proposition et 1.8 Remarque, p. 53.
  4. Mansuy et Mneimné 2022, 2.1 Définition, p. 54.
  5. Mansuy et Mneimné 2022, 2.2 Proposition, p. 54.
  6. Mansuy et Mneimné 2022, 2.8 Proposition, p. 55.
  7. Mansuy et Mneimné 2022, 2.11 Définition, p. 56.
  8. Mansuy et Mneimné 2022, 3.1 Définition et 3.2 Remarque, p. 4.
  9. Mansuy et Mneimné 2022, 1.11 Proposition, p. 54.