Justine Favart autrice et interprète: rôle d’une artiste polyvalent...
- ️Mele, Flora
- ️Sun May 15 2022
Résumé
Les théâtres de société furent des lieux d’expérimentation et de liberté d’expression où, en s’échappant de la censure et des contraintes des théâtres officiels, on favorisait l’épanouissement des interprètes féminines et des femmes auteurs. Justine Favart, artiste polyvalente, autrice brillante et femme du dramaturge Charles-Simon Favart, fut omniprésente et toujours en première ligne dans la création et l’interprétation des spectacles du couple qui se tinrent à Bagatelle, chez Madame de Monconseil. Grâce à l’impulsion et aux amitiés de son premier mécène, le roi Stanislas Lesczynski, elle développa un réseau bien étendu autour de cette puissante aristocrate. À travers les manuscrits de ces nombreuses fêtes, cet article montre le rôle de Justine dans l’organisation de ces évènements qui eurent lieu dans un contexte féminin d’exception, permettant à l’artiste de mieux affirmer son statut d’autrice et d’interprète.
Bibliographie
Sources manuscrites
Bibliothèque historique de la Ville de Paris (BHVP):
– FG665 et NA 230.
Bibliothèque nationale de France (BnF):
– Département de l’Arsenal, MS 3269, MS 3270, MS 3271, MS 284 et MS 9569.
– Département des Arts du spectacle, Fonds Rondel, MS 284.
Bibliothèque-musée de l’Opéra de Paris:
– Fonds Favart, carton III, 3.
Médiathèque Michel Crépeau de La Rochelle:
– MS 650.
Sources imprimées
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Travaux
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Zaccaria, Michela, Primedonne. Flaminia e Silvia dalla Commedia dell’Arte a Marivaux, Roma, Bulzoni editore, 2019.
Crédits iconographiques
Fig. 1: BnF, département de l’Arsenal, MS 3269, f. 20 v.
Notes
1 Voir A. Mouzin, «Madame Justine Favart, artiste et femme de Lettres».
2 Parmi les témoignages élogieux des contemporains, celui de Restif de la Bretonne l’est particulièrement: «Ce qui fit tomber le théâtre, avant que Mademoiselle Favart le relevât, c’était le mauvais jeu des acteurs»; «FAVART: elle a fait durant plusieurs années toute la ressource du théâtre à ariettes, par ses rôle dans Ninette, La Bohémienne, La Servante maitresse etc.» (N.-E. Rétif de la Bretonne, La Mimographe ou Idées d’une honnête femme pour la réformation du théâtre national, p. 402 et 465).
3 Voir les articles de F. Mele, «Autour d’une parodie de L’Orphelin de la Chine de Voltaire» et «Être auteur d’opéras-comiques au XVIIIe siècle».
4 Voir R. Legrand, «Justine Favart compositrice».
5 «L’importance de la musique dans la société d’Ancien Régime n’est pas à démontrer. Rappelons seulement que Madame de Genlis se fit ouvrir les portes de l’aristocratie par ses talents de harpiste» (M.-E. Plagnol-Diéval, «Les proverbes de Carmontelle», p. 173, n. 194). L’iconographie de Madame Favart présente de nombreuse fois l’artiste jouant de la harpe.
6 Voir à propos de la musique à Lunéville les articles de R. Depoutot, «La musique à la cour de Lunéville sous le règne de Stanislas à la lumière de deux inventaires» et «Le Triomphe de l’Humanité, une œuvre de commande de la ville de Nancy à Claude Seurat maître de musique de la primatiale».
7 Sa formation initiale, à la cour de Stanislas, marqua la carrière parisienne de Justine dans la compagnie de son futur époux Charles-Simon Favart.
8 Elle joua aussi dans une pantomime appelée Les Vendanges de Tempé, en 1745 et Charles-Simon Favart réussit grâce à elle à redémarrer l’Opéra-Comique, avec l’ouverture d’une salle à la Foire Saint-Laurent, sous le nom du danseur de corde Matthews.
9 Lécluse était aussi le dentiste de Stanislas et de Voltaire. Voir Madame de Graffigny, Correspondance de Madame de Graffigny, p. 407, lettre 1354, n. 4: Lettre de Devaux à Madame de Graffigny. Elle souligne la présence de Lécluse; Ibid., p. 496, lettre 1390: Lettre de Madame de Graffigny à Devaux.
10 «La morale de Stanislas, quoique rattachée à ses croyances religieuses, est dictée essentiellement par la raison, […] l’homme doit viser à une sociabilité universelle, […] c’est dans la polémique très courtoise que Stanislas a entretenue avec Jean-Jacques Rousseau que l’on trouve l’exposé le plus clair de sa conception de la vie en société» (J.- Cl. Bonnefont, «Stanislas philosophe», p. 77 sq.).
11 Avec son Entretien d’un Européen avec un insulaire du royaume de Dumocala paru en 1752, tout en s’inspirant de L’Utopie de More et de La Cité du soleil de Campanella, Stanislas esquissa une cité idéale.
12 Stanislas était aussi un bon comédien. En témoigne le fait qu’il avait traversé incognito l’Empire, déguisé en marchand rhénan, pendant qu’un sosie s’était embarqué à Brest sur un vaisseau du roi. Voir les ouvrages de A. Muratori-Philip sur Stanislas et en particulier Le roi Stanislas, p. 100 sq.
13 «[...] La marquise était fort jolie femme, plus galante encore et, s’il est possible, encore plus incrédule. Elle ne concevait pas comment on pouvait aimer Dieu» (L.-É. de La Vergne, comte de Tressan, Souvenirs du comte de Tressan, réunis par son arrière-petit-neveu, le marquis de Tressan, p. 74 sq.).
14 La Femme qui a Raison de Voltaire fut d’ailleurs créée à Lunéville, en 1749.
15 Voir N. Berton, «Évolution de l’orchestre et du petit opéra à la cour de Lorraine (1690-1737)».
16 Il faut souligner la «grande place» que tint la musique dans la vie de Stanilas; voir R. Depoutot, «La musique à la cour de Lunéville sous le règne de Stanislas à la lumière de deux inventaires», p. 61.
17 Le roi Stanislas reprit la propension de son prédécesseur Léopold Ier, dans ce château et en Lorraine, car la musique avait connu «un développement particulier, dû au goût» de ce souverain et au travail d’Henry Desmarest. À cette époque, on jouait déjà dans cette cour des opéras de circonstance où souvent les courtisans se mélangeaient aux professionnels et où les ouvrages de Regnault/Biancolelli, dit Dominique, l’acteur du théâtre italien étaient représentés. Voir à ce propos M. Antoine, Henry Desmarest (1661-1741).
18 Déjà en 1725, Étienne Guinot de Monconseil, mari de la marquise, rejoignait Stanislas en Alsace, lorsqu’il était en exil à Wissembourg, avec la charge de veiller à sa sécurité. À cette époque, Stanislas n’était pas encore devenu ni beau-père de Louis XV, ni duc de Lorraine.
19 Ch. Gailly de Taurines, Aventurieres et femmes de qualité, p. 186 sq.
20 L. Bouyer, «Une intrigante et son mari au XVIIIe siècle».
21 «Cette “grande intrigante”, comme l’appelle d’Argenson était en même temps femme d’esprit et même un peu bas-bleu» (E.-N. Welvert, La princesse d’Hénin, p. 5).
22 Voir le catalogue raisonné des manuscrits de Favart contenu dans F. Mele, Le théâtre de Charles-Simon Favart.
23 Elle fut autorisée à l’important privilège de «monter dans les carrosses […]» (H. G. Duchesne, Le Château de Bagatelle [1715-1908], p. 102).
24 Ch.-Ph. d’Albert, duc de Luynes, Mémoires du duc de Luynes sur la cour de Louis XV (1735-1758), p. 126.
25 Grâce à son mariage avec Alexandre-Charles-Marcellin d’Alsace Chimay-Liétard d’Hénin; en 1788, elle devint dame du palais de la reine Marie-Antoinette, après avoir vu Bagatelle envahie par le peuple de Paris «qui s’y donnait rendez-vous pour faire de larges bombances dans le restaurant du sieur Born. Madame Hénin rentra à la cour à la seconde abdication» (H. G. Duchesne, Le Château de Bagatelle [1715-1908], p. 109).
26 La maréchale de Luxembourg tint aussi un salon.
27 Fille du duc de Richelieu. À son tour, elle recevait Voltaire et Rousseau dans son salon et s’opposa à Madame du Barry.
28 Cécile-Pauline Charpentier d’Ennery, comtesse de Blot, 1733-1800 (peinte comme beaucoup d’autres par Carmontelle). Elle fut dame d’honneur de la duchesse d’Orléans. Rappelons qu’elle eut un rôle important pour le mariage de Marie Leszczynska avec le roi.
29 «Mademoiselle Favart dans une nouvelle carrière qui ne lui fit pas moins d’honneur, et où le public doit lui tenir compte du travail assidu qu’elle est maintenant obligée de joindre aux dons de nature» (Le ballet des savoyards de la composition de Monsieur de Hesse, argument, BnF, département de l’Arsenal, Fonds Douay, GD-6017).
30 BnF, département de l’Arsenal, ms 3269, f. 4v. Voir aussi Ch.-Ph. d’Albert, duc de Luynes, Mémoires du duc de Luynes sur la cour de Louis XV (1735-1758), p. 245.
31 Un «savoyard» était un petit ramoneur; ces enfants voyageaient en Europe et montraient une lanterne magique, tout en amusant le peuple avec des marionnettes dansant au son de leur vielle.
32 «[…] qui veut voir la rareté, la curiosité, la pièce curieuse? L’un d’eux pose la curiosité sur une table, et en fait l’explication» (BnF, département de l’Arsenal, ms 3269, f. 5).
33 Le manuscrit cite en premier Commercy: «remarquez bien le château d’eau, qui paraît un ouvrage de magie», mais il s’agit aussi de voir le château de Malegrange, «Palais de Féerie, où le goût l’emporte encore sur la richesse et la magnificence» (MS 3269). Si le Kiosque et le Trèfle furent les constructions les plus intéressantes de Stanislas, on peut compter parmi ses constructions «[…] exotiques [… le] château de la Malgrange recontruit par le roi, avec la décoration de sa façade en carreaux de céramique, de même pour les toits recourbés à la chinoise des tourelles flanquant le palais d’Einville ou des pavillons du Kiosque et de la Fontaine royale de Commercy» (F. Bayle [éd.], Stanislas, un roi de Pologne en Lorraine, p. 154).
34 «tout le peuple» qui est «transporté d’admiration» (BnF, département de l’Arsenal, ms, 3269, f. 6).
35 «L’activité artistique de Stanislas Leszczynski en Lorraine, […] est un des faits les plus intéressants de l’histoire de l’art du XVIIIe siècle et, dans certains domaines, il apparaît précurseur […] Il faut regretter que ses folies pleines de fantaisie, issues de différents courants et traditions de l’art européen, n’aient pas survécu» (F. Bayle [éd.], Stanislas un roi de Pologne en Lorraine, p. 157).
36 Les femmes n’étaient pas du tout oubliées dans le contexte de ces fêtes: «Dans cet heureux pays;/Enfin jusques aux femmes/Font nargue aux beaux esprits/Qu’on voit à Paris» (BnF, département de l’Arsenal, ms, 3269, f. 6).
37 «À sa cour on me vit former,/Ah! quel plaisir de l’aimer!/D’un regard il sut m’animer,/Sa bonté son courage:/Ah! quel plaisir de l’aimer/Et de lui rendre hommage!» (Ibid., f. 9 rv).
38 Premier novembre 1755.
39 Mai-juin 1756.
40 Voir à ce propos F. Mele, «Pièces modulables et influences italiennes dans les manuscrits des Favart».
41 G. Attinger, L’esprit de la commedia dell’arte dans le théâtre français, p. 348. Voir aussi Th.-S. Gueullette, Notes et souvenirs sur le Théâtre-italien au XVIIIe siècle, p. 49. Jean-Baptiste-François Dehesse était déjà actif en 1737 et collaborait souvent avec François-Antoine Valentin Riccoboni; à partir de 1749, il devint le maître de ballet incontesté; voir E. de Luca, «Un uomo di qualche talento», p. 220.
42 BnF, département de l’Arsenal, MS 3269, f. 8v. Voir aussi à ce propos le fragment de cette pièce in BnF, Bibliothèque de l’Opéra, Fonds Favart, Carton II, II, 49.
43 MS 3269, f. 9. Dans le prologue apologétique de cette pièce qui est contenu au tome V du Théâtre de Monsieur et Madame Favart, Justine admet avoir eu recours à un teinturier pour la mise en vers de la pièce, mais elle tient aussi à mettre en valeur son rôle de femme dramaturge: «Je n’ai pas le talent (des vers): aussi, quand je compose,/Je cherche quelque auteur docile et complaisant,/Qui veuille bien donner des grâces à ma prose/En y jetant des vers de charme séduisant». Champville lui répond «[…] d’écrire quelques traits jetés à l’aventure,/et vous dites après d’un ton de dignité:/qu’on porte cette prose à la manufacture,/et qu’on la mette en vers» (Favart, Théâtre de Monsieur et Madame Favart, p. 6).
44 Rappelons, pour souligner l’actualité de la pièce dans ce type de théâtres, que Zélindor le roi des Sylphes fut représenté le 4 mars 1753 au Théâtre des Petits Appartements, juste deux jours avant Le Devin du village de Rousseau. La troupe, chez la marquise de Pompadour, était composée ainsi: Zélindor (Pompadour), Zirphée (Marchais), Zulim (Clermont d’Amboise), Ondin (Courtanvaux), Salamandre (Melfort).
45 «Desbrosses [Robert], [...] Musicien et Acteur, reçu à pension au Théâtre Italien depuis 1749. La musique des Sœurs rivales, du Bon Seigneur et de plusieurs autres petites pièces dans le même genre est de lui» (A. de Léris, Dictionnaire portatif historique et littéraire des théâtres, contenant l’origine des différents théâtres de Paris, p. 552).
46 . «Les convives étaient, en dames: Mmes de Monconseil, de Baye, de Boufflers, de Bassompierre, de Talmond, de Blot, et les deux petites filles; en hommes: M. le maréchal de Coigny, l’abbé de Boufflers, M. de la Galaisière, son frère, son fils l’abbé, M. de Croix, M. de Curzay, M. le président Hénault, M. le chevalier de Listenois, M. de Tressan et deux autres que j’ai oubliés; ils étaient en tout 21 en comptant le roi de Pologne» (Ch.-Ph. d’Albert, duc de Luynes, Mémoires du duc de Luynes sur la cour de Louis XV [1735-1758], p. 162).
47 «Ensuite sa majesté se mit à table, où elle resta très peu de temps; à la sortie de laquelle on la supplia de vouloir bien prendre son caffé à la foire: elle y consentit, et passa dans le jardin, où on avait disposé, de droite à gauche, le long d’une allée des boutiques remplies de tout ce qui se vend aux foires; et surtout force tambourins, flutes et trompettes marines, dont le retentissement accompagnait assez bien les cris de joie» (MS 3269, f. 12v).
48 J. Favart, Les Ensorcelés, in Théâtre de Monsieur et Madame Favart. Dans l’édition de 1757 des Ensorcelés, Justine Favart fit insérer une dédicace à la princesse de Galitzin.
49 Les Surprises de l’amour, ballet en trois actes séparés de Bernard, sur musique de Rameau. La première représentation eut lieu à l’Académie royale de musique, le 31 mai 1757. Les deux premiers actes avaient déjà été représentés en 1748 à la cour, sur le théâtre des petits Appartements de la Pompadour qui y joua en Vénus et en Uranie. En juillet, l’acte de la Lyre enchantée fut éliminé et il fut remplacé par les Sibarites. Puis, celui d’Anacréon fut parodié à la Comédie-Italienne sous le titre de La Petite maison.
50 «[…] Dans le bosquet la voix du crieur qui appelait pour la comédie, qui fut représentée dans un très joli bosquet, décoré et orné de guirlandes de fleurs naturelles, où on joua pour la première fois Les Ensorcelés, pièce en un acte, pleine d’esprit et de naïveté, et de jolie musique; à la fin de laquelle sa majesté trouva sur le chemin les jeunes enfants qui lui présentèrent des devises, et à toutes les dames de sa suite» (MS 3269, f. 13). «On y exécuta avec une très bonne musique une pièce de la Comédie-Italienne qu’on appelle Les Ensorcelés; elle est en prose et en vers; elle fut exécutée parfaitement et dura environ une bonne demi-heure. Enfin le roi de Pologne passa sur un banc au bout d’une allée où toute la fête du village vint au-devant de lui. La petite Baletti, fille de Silvia, et la petite Favart marchaient à la tête du village, ayant chacune une guitare dont elles s’accompagnaient avec beaucoup de grâces; elles chantèrent ensemble, sur l’air de la Dame Française, sept couplets de chansons fait exprès pour le roi de Pologne. Le chœur du village les répétait avec la musique dont j’ai parlé. Ce fut avec ce chœur que le roi de Pologne fut conduit jusqu’à son carrosse» (Ch.-Ph. d’Albert, duc de Luynes, Mémoires du duc de Luynes sur la cour de Louis XV [1735-1758], p. 164 sq.).
51 Fréron, Année Littéraire, septembre 1757, vol. 6, p. 140.
52 Ibid.
53 Rappelons aussi que Préville, en 1760, joua autant dans Les Philosophes de Palissot, dans le rôle de Crispin, que dans sa réplique, Le Caffé de Voltaire, dans le rôle de Freeport, ce qui montre sa versatilité.
54 Fréron, Année Littéraire, septembre 1757, vol. 6, p. 144.
55 «Deux sœurs de Mme Carlin [Mlle Françoise-Suzanne Foulquier, épouse Bertinazzi] furent aussi attachées à la Comédie-Italienne; l’une s’appelait Catherine-Antoinette Foulquier, dite Catinon, et débuta le 20 décembre 1753 par le rôle d’Angélique dans La Mère confidente de Marivaux. Actrice assez médiocre mais bonne danseuse et très-jolie femme, elle épousa M. de Rivière, chargé d’affaires de la cour de Saxe et en eut une fille, mariée plus tard au poète Vigée, frère de Mme Lebrun. Catinon Foulquier […] quitta le théâtre en 1769» (É. Campardon, Les comédiens du roi de la troupe italienne pendant les deux derniers siècles, I, p. 49 sq. et 105 sq.).
56 Cette fête est aussi contenue dans le manuscrit 650 de la Médiathèque Michel Crépeau de La Rochelle et il y en a un fragment dans une collection privée. Voir à ce propos F. Mele, Le théâtre de Charles-Simon Favart, entrée 44.3, p. 177.
57 «Mme de Monconseil […] avait déjà fait tous ses arrangements; tout était déjà prêt pour les différents divertissements, soit dans le jardin, soit dans la maison, suivant le temps. On avait fait une répétition et elle se flattait qu’elle obtiendrait jour pour aujourd’hui mardi. […Stanislas] est arrivé chez Mme de Monconseil, qu’il a trouvé toute seule avec sa famille. Cette surprise n’a pas empêché qu’il n’ait quelques vers et quelques chansons de fort bon goût et très flatteuses; elles ont été chantées par Mlle de Monconseil, qui a neuf ou dix ans […]. Le roi de Pologne a pris un peu de caffé; il y a eu de bonnes plaisanteries, et le tout a duré un bon quart d’heure» (Ch.-Ph. d’Albert, duc de Luynes, Mémoires du duc de Luynes sur la cour de Louis XV [1735-1758], p. 78 sq.).
58 Gueullette souligne à propos de cette pièce: «La Fille mal gardée. Parodie de La Provençale, en un acte. Ariettes. Le fond de cette pièce est de M. Favart, qui l’avait abandonnée et laissée imparfaite. Sa femme proposa à M. l’abbé Attagnau d’y travailler avec elle, et cela fut exécuté. Très bien reçue» (Th.-S. Gueullette, Notes et souvenirs sur le Théâtre-italien au XVIIIe siècle, p. 170).
59 Le manuscrit 3271 du recueil de l’Arsenal, contenant cette fête, doit être mis en relation avec un autre manuscrit très complexe et volumineux qui est conservé à la Bibliothèque nationale de France, au département de l’Arsenal (MS 9569), comparable à son tour au manuscrit 650 de la médiathèque Michel Crépeau de La Rochelle. Ces trois manuscrits contiennent tous une même pièce en évolution, tirée du Roman comique de Scarron et concernant les comédiens du Mans. Justine Favart y participa en tant qu’interprète, mais elle ne fut certes pas étrangère à la mise en spectacle de cet ouvrage. Voir F. Mele, «Pièces modulables et influences italiennes dans les pièces de Favart».
60 «[…] on joue Les Amours de Bastien et Bastienne, pièce du Théâtre Italien. Après la pièce on chante [d]es couplets», avec un vaudeville final où s’alternent Colas et les autres personnages. La pièce se termine par une danse générale, vu que les acteurs finissent par inviter tout «ce beau monde à danser, puisqu’il est temps de Carnaval», (MS 3270, f. 6 sq.).
61 Voir R. Legrand, «Les Amours de Bastien et Bastienne de Marie-Justine Favart et Harny de Guerville».
62 L’intrigue de la parodie Bastien et Bastienne était la même que celle du Devin du village et la musique n’était pas originale. Le Devin du village avait été représenté le 6 mars 1748 au Théâtre des Petits appartements. Sa première version date de 1753 même si, comme le souligne Raphaëlle Legrand, la date du 26 septembre 1753 apparaît sur la page de titre du livret de 1754; elle est «(reprise ensuite dans toutes les éditions ultérieures), corroborée par la date du visa de censure, 13 août 1753», et démentie par des sources concordantes: le registre de la Comédie-Italienne, Le Mercure de France, Thomas-Simon Gueullette, car les trois donnent la date du 4 août 1753. Cette information est importante dans le cadre de la chronologie de la Querelle des Bouffons. Comme le souligne Legrand, le «visa de censure n’était pas encore obtenu lors de la première, ce qui expliquerait l’absence d’un livret imprimé en août 1753». La parodie fut ensuite jouée à Vienne et inspira Mozart (R. Legrand, «Les Amours de Bastien et Bastienne», p. 174).
63 H. Blank, Rousseau, Favart, Mozart.
64 «À la petite lottrie pour un liard/On gagne un bon lot par hasard/Vous qui voulez pour ces fillettes/Faire à bon marché des emplettes/Mon panier vous en fournira,/Remplissez tretous vos pochettes/De croquet et de nougats, de gimblettes:/À la petit’ lotri’ pour un liard/On gagne un bon lot par hazard./Eh! roulez, roulez pour un liard,/On gagne un bon lot par hazard…» (BnF, Arsenal, MS 2371, f. 11 sq.).
65 Les deux Foulquier, ainée et cadette, étaient aussi les sœurs de Madame Carlin, femme du très connu Arlequin Bertinazzi. Rappelons que la Catinon, qui était surtout une excellente danseuse, avait joué avec Desbrosses, aux côtés de Justine Favart, dans Ninette à la cour. Voir à propos de la Catinon, É. Campardon, Les comédiens du roi de la troupe italienne pendant les deux derniers siècle, p. 49 sq.
66 BnF, département de l’Arsenal, ms. 3270 f. 25-60.
67 Th.-S. Gueullette, Notes et souvenirs sur le Théâtre-italien au XVIIIe siècle, p. 165 sq. Silvia, tout comme Justine Favart et la plupart des Comédiens Italiens de l’époque, était aussi une danseuse extraordinaire; voir E. De Luca, «Un uomo di qualche talento», p. 127. Silvia louait par ailleurs un appartement dont les Favart était propriétaires, ce qui suggère un lien supplémentaire entre les deux familles et les deux actrices; voir à ce propos M. Zaccaria, Primedonne, p. 162.
68 Ibid., f. 69-110.
69 Il s’agissait d’une période de développement des musiques à la Comédie-Italienne. Cette phase correspondait avec les saisons d’opéra italien à Paris et était favorisée par les productions de Favart. Voir à ce propos E. De Luca, «Un uomo di qualche talento», p. 227 et A. Fabiano Histoire de l’opéra italien en France, p. 45-48.
70 Que ce soit dans la version de Marmontel ou de Justine Favart, ou bien dans l’autoparodie des Favart. Voir à ce propos F. Mele, «Être auteur d’opéras-comiques au XVIIIe siècle».
71 Il y a trois manuscrits de cette autoparodie: le manuscrit A (NA 230, de la Bibliothèque historique de la Ville de Paris), autographe de Chevalier qui a pour titre Annette et Lubin, comédie en un acte mêlée d’ariettes; le manuscrit B (BnF, département des Arts du spectacle, Rondel MS 284), Fête donnée à Mgr le Maréchal duc de Richelieu, par Madame la marquise de Monconseil à Bagatelle, le août 1762; le manuscrit C (Fonds Favart, carton III, 3 de la Bibliothèque de l’Opéra) intitulé Lubin et Annette, autographe de Lourdet de Santerre, daté de 1788; il est donc postérieur à la date de la mort de Madame Favart, le 20 avril 1772, alors qu’elle était âgée de 45 ans.
72 «La parodie est une arme critique contre les modèles et les genres à l’honneur sur les théâtres officiels et les théâtres privés avides de les imiter» (M.-E. Plagnol-Diéval, Le théâtre de société, p. 214).
73 Comme le souligne Fréron et surtout comme en témoigne une lettre de Charles-Simon Favart à Madame de Monconseil: «Je voudrois aussi être instruit des personnages qui composent la société, et de leurs anecdotes, en y comprenant le jardinier même», ce qui montre un engagement professionnel qui va au-delà de la simple application d’un plan offert par la marquise de Monconseil (Ch.-S. Favart, Mémoires et correspondance littéraires, dramatiques et anecdotiques, p. 414).
74 Même si, à cette époque, se substitue à Charles et Justine le couple Goldoni Piccinelli. Voir à ce propos A. Fabiano, La Comédie-Italienne de Paris et Carlo Goldoni, p. 199.
75 M. -E. Plagnol-Diéval, «Les proverbes de Carmontelle», p. 178.
Pour citer cet article
Référence papier
Flora Mele, « Justine Favart autrice et interprète: rôle d’une artiste polyvalente en «société» », Études de lettres, 317 | 2022, 45-66.
Référence électronique
Flora Mele, « Justine Favart autrice et interprète: rôle d’une artiste polyvalente en «société» », Études de lettres [En ligne], 317 | 2022, mis en ligne le 15 mai 2023, consulté le 15 mars 2025. URL : http://journals.openedition.org/edl/3784 ; DOI : https://doi.org/10.4000/edl.3784
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