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Les structures politiques des institutions. L'exemple de la Quatrième République - Persée

  • ️Gaxie, Daniel
  • ️Thu Sep 14 2017

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Les structures politiques des institutions

L'exemple de la Quatrième République

Daniel Gaxie

Centre de recherches politiques de la Sorbonne

Université Paris I

SOUS LA IVE REPUBLIQUE , les membres du gouvernement sont, la plupart du temps, dans l'impossibilité d'imposer leur volonté aux parlementaires. Les discussions budgétaires sont révélatrices à cet égard. Les dispositions du projet de budget sont fréquemment supprimées, modifiées ou disjointes. Si un gouvernement décide de réduire les charges nouvelles, des partis, dont certains peuvent appartenir à la majorité, vont s'empresser de déposer des propositions de loi tendant à augmenter les dépenses les plus populaires — comme, en novembre 1952, les prestations sociales — et le gouvernement devra alors recourir à la question de confiance. Inversement, s'il demande de nouvelles recettes, il se heurtera à l'hostilité des élus et son existence sera menacée1. Les parlementaires qui, constitutionnellement, n'ont pas l'initiative financière, savent se donner les moyens d'éplucher la loi de finances, par exemple en ajournant la discussion de façon à contraindre le gouvernement à déposer des «lettres rectificatives»2. Dans de telles conditions d'adoption, le budget est souvent voté avec retard : la loi de finances 1953 est adoptée le 6 février de l'année en cours et le budget de 1951 est voté au mois de mai ! Faute de pouvoir imposer sa politique, le gouvernement préfère parfois ne pas en avoir. Lorsqu'un problème délicat est posé au moment de la constitution d'un gouvernement, il arrive que le président du Conseil «pressenti» ou «désigné» précise que les futurs membres de son gouvernement arrêteront librement leur attitude au moment du vote (comme Guy Mollet en janvier 1956 à propos de l'abrogation des lois scolaires) ou qu'il renonce par avance à poser la question de confiance pour ne pas peser sur sa majorité (comme René Mayer en janvier 1953 pour le projet de communauté européenne de défense).

Cette faiblesse de l'exécutif est d'abord celle de ses chefs présumés : le président de la République n'est qu'un médiateur qui engage son autorité afin de tenter de trouver des issues aux conflits et le président du Conseil est le plus souvent paralysé, contraint qu'il est de respecter de minutieux dosages au moment de la composition du gouvernement et de négocier chaque décision

72 Pditbc, n°20, 1992, pages 72 à 98