La France de la fin du XVe siècle. Renouveau et apogée, 1985 - Persée
- ️Derville, Alain
- ️Mon Apr 04 2022
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La France de la fin du XVe siècle. Renouveau et apogée, Paris, C.N.R.S., 1985.
On trouvera ici les actes du colloque de Tours (octobre 1983) qui a commémoré le cinquième centenaire de la mort de Louis XI. Ph. Contamine a donné l'introduction, B. Chevalier la conclusion. 21 auteurs ont illustré à leur manière quatre thèmes, économie, pouvoir, arts, culture et conscience nationale, dans un cadre chronologique assez flou, débutant parfois vers 1450, finissant parfois vers 1540.
Ph. Contamine, pour sa part, situe l'apogée démographique vers 1560 et celui des salaires vers 1480 ; nulle innovation, nul progrès : après la parenthèse 1350- 1450 on reconstruit à l'identique l'économie, n'en déplaise à F. Braudel, mais aussi la seigneurie, qui se porte très bien, et l'Etat monarchique lui-même. H. Dubois n'est guère optimiste pour le commerce. Ph. Genet, s'il croit que la royauté perçoit le royaume comme un espace économique, se refuse à parler de politique économique. M. Le Mené pense que, pour l'Anjou, l'apogée se situe avant 1470. H. Neveux estime que les niveaux de 1300 n'ont pas été retrouvés en 1500 et que « la reconstruction a modifié plus ou moins sensiblement les relations sociales dans les campagnes. . . ». Voix bien discordantes, image bien floue, renouveau bien problématique, apogée bien douteux !
W.P. Blockmans a analysé l'échec de la politique royale en Flandre de 1477 à 1493. N. Bulst a dégagé l'importance des Etats Généraux de 1468, si méconnus. P.R. Gaussin a esquissé une prosopographie des 462 conseillers de Louis XI, dont 47% seulement étaient des roturiers, ce qui montre que ce prince n'était pas « le roi des bourgeois ». M. Harsgor a silhouetté « le groupe dirigeant français », calculé que ces « oligarques » avaient mis la main sur 50,68% des bailliages et gouvernements, sur 72,48% des évêchés et archevêchés, les plus gras bien sûr, et souhaité l'avènement d'une oligarchologie. M. Jones a étudié la petite, mais horriblement coûteuse, armée bretonne de 1449 à 1491. P. S. Lewis a étudié les pensionnaires de Louis XI, environ 760 personnes absorbant 35% des ressources de la monarchie, dont 61 dévorant à eux seuls la moitié de cette manne. W. Paravicini, partant des procès politiques, celui en particulier du connétable de Saint-Pol, a dégagé quelques constantes des comportements des princes, en particulier l'incroyable terreur que leur inspirait le roi, car ils étaient tous peu ou prou coupables de trahison, d'alliances contre lui, bref de lèse-majesté. W.A. Weary a montré par quels moyens et avec quel succès les La Tremouille ont rétabli leur fortune de 1460 à 1542 : 40 355 livres de revenu en 1396, 8 200 vers 1486- 1496, 39 200 vers 1526-1542. Ces huit contributions, dont sept dues à des savants étrangers, sont toutes remarquables et, comme elles vont dans le même sens, elles contribuent à préciser et à enrichir notre vision.
U. Albrecht et J. Guillaume ont consacré chacun des pages brèves, mais suggestives, à ce qu'étaient alors les châteaux français, du moins du côté de la Loire et montré comment s'étaient définis des partis architecturaux qui, même après l'irruption des décors italiens, donneraient leur originalité aux châteaux français de la Renaissance. F. Robin a décrit les chapelles des rois et des princes (surtout celle du roi René) sous leurs différents aspects, bâtiment, groupe de chapelains et de chantres, mobilier, vases liturgiques, tout cela étant également appelé chapelle à l'époque. Quant à l'art français d'alors, qu'il s'agisse de musique (J.M. Vaccaro) ou de peinture (A. Châtelet) il est soumis à « l'impérialisme culturel » de la Flandre, comme on dit, d'une Flandre qui irait jusqu'à Cambrai et Saint- Quentin.