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Jean-François Millet : “Millet USA”

Toute la créativité et l’influence du peintre, connu pour ses scènes pastorales et paysannes, sont remises en lumière par cette rétrospective passionnante.

Publié le 25 novembre 2017 à 12h00

Mis à jour le 08 décembre 2020 à 01h38

Oublions l’image de L’Angélus, qui ­ternit la gloire de Jean-François Mil­let (1814-1875) d’une double infamie : son écœurante déclinaison commerciale et sa récupération par le régime de Pétain pour illustrer sa devise : « La terre, elle, ne ment pas. » Depuis 1975, aucune exposition n’avait remis en ­lumière ce peintre que Van Gogh (1853-1890) tenait pour essentiel à l’art moderne, plus encore qu’Edouard Manet. Fils de paysan du Cotentin, Millet fait ses humanités en copiant la riche collection de peintures du musée de Cherbourg, puis celle du Louvre. Au Salon de 1848, son Vanneur tranche parmi les cinq mille œuvres exposées : un simple agriculteur, tout à la tâche de séparer le bon grain de l’ivraie, dans une silhouette synthétisée en larges plans, avec des touches orange et bleues à la Nicolas Poussin. Millet a trouvé sa manière : se documenter à l’aide d’esquisses d’une énergie à la Rubens pour, ensuite, recréer des typo­logies de paysans inscrits dans une nature façonnée par leur travail. L’intime, le rustique, la veine bibli­que… Nouant subtilement pastels, dessins et toiles, cette exposition lilloise, jamais écrasante, décline les thèmes chers à l’artiste, et met en ­lumière son immense culture littéraire et picturale, en particulier son admiration pour les maîtres flamands du xviie siècle. Ses toiles fascinaient tellement la colonie des peintres américains de Barbizon, où Millet s’installe en 1849, qu’ils importèrent son ima­ginaire pastoral aux Etats-Unis.

Au point que, dans les années 1930, lorsque le gouvernement mandate Dorothea Lange, Walker Evans ou ­Arthur Rothstein pour photographier le travail des victimes de la grande ­dépression, ces derniers font poser leurs sujets dans des compositions se référant au peintre. Leurs images, confrontées à l’œuvre de Millet, guident la seconde partie de ce passionnant parcours.

| Jusqu’au 22 janvier, palais des Beaux-Arts, Lille (59). pba-lille.fr | Catalogue, éd. RMN - Grand-Palais, 256 p., 35 €.

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