Site officiel de la mairie de Sangatte Blériot-Plage - Les églises ont une histoire...
“Au moyen-âge, trois lieux dits du territoire de Sangatte se présentent à l’étude de l’historien. C’est d’abord le chef-lieu ancien de la paroisse, Saint-Martin de Sclives, nommé pour la première fois dans la charte de confirmation que le Comte Manassès de Guînes accorda à l’abbé Gislebert d’Andres, vers l’an 1091.
Saint-Martin de Sclives est resté longtemps le titre paroissial des curés de Sangatte. Il l’était encore en 1145, sous l’occupation anglaise. On en connaît encore l’emplacement sur le versant du Blanc-Nez, près de la voie de Leulène, aux extrèmes limites des territoires de Sangatte et de Peuplingues. Le village de Sangatte, où cette église fut transférée par la suite avec son vocable ne présente pas d’aussi lointains souvenirs.
C’était cependant une seigneurie dont le titulaire, Gaufridus de Sangata, se trouvait en 1118 à la cour du Comte Manassès de Guînes. L’église de Sangatte, sous le vocable de Saint-Martin était un édifice misérable.
Parmi les curés qui la servirent, il faut citer Martin Bailleul, ancien vicaire de Calais, auteur de curieux mémoires sur les antiquités du pays reconquis, mort en 1639. Selon un rapport adressé à l’évêque Henriau par le curé Philippe Dezoteux, la paroisse comptait environ cent dix feux (1) en 1725. Sous la révolution, le curé de Sangatte refusa de prêter le serment constitutionnel (2).
Le projet de construire une nouvelle église, en remplacement de l’ancienne qui tombait en ruines, fut établi le 20 mars 1866 et mentionne qu’elle se composera dans son ensemble de trois nefs et sera surmontée d’un clocher en flêche avec coq en cuivre tournant sur billes. La bénédiction de la première pierre fut faite par Monseigneur Jean-Baptiste Lequette, évêque d’Arras le 18 avril 1868.
Deux cloches ont pris place dans le clocher en 1870. Elles portent ces inscriptions : “Je m’appelle Marine Félix. L’an de grâce 1870 sous le glorieux Pie IX, pape, j’ai été baptisée par Monseigneur de Lencquesaing, curé doyen de Calais. Vieillard-Delhaye, maire, Gabrielli, curé. J’ai eu pour parrain Félix Vieillard, fils du défunt Félix et de dame Célerine Delacre et pour marraine Marine Vincent, fille de défunt Jacques et de défunte Félicité tournant, tous deux de Sangatte. Je míappelle Euphémie Isidore. L’an de grâce 1870, sous le glorieux Pie IX, Pape, j’ai été baptisée par Monseigneur de Lencquesaing, curé doyen de Calais. Vieillard-Delhaye, maire, Gabrielli, curé. J’ai eu pour parrain Isidore Trouille, fils de défunt Isidore et de dame Louise, de Sangatte et pour marraine Euphémie Admont, fille de Joseph et de dame Séraphine Vieillard d’Hervelinghem.”
Le 4 janvier 1903, à la suite d’un violent orage, la foudre s’abat sur le clocher en démolissant le sommet ainsi que les façades Est et Sud. De ce fait, un nouveau projet envisage notamment le dérasement du sommet de la flêche, sa réfection, l’arrangement des pinacles (3), la remise en état des arcades, des croisées et la pose d’un paratonnerre à ruban. En juillet 1903, les travaux étaient très avancés (flêche terminée), un nouveau cyclone provoque encore des dégâts dans la nuit du 10 au 11 septembre 1903, le sommet de la flêche est à nouveau jeté par terre. Devant ces catastrophes, le conseil municipal décide de ne plus construire le clocher en flêche. Le 5 décembre 1903, les travaux terminés donnent au clocher la forme qu’il était possible de voir à l’arrivée des Allemands. Au cours de l’occupation allemande en fin 1940, son accès fut interdit et les cloches qu’il abrite devront rester muettes ! Ce ne devait être à l’origine qu’un poste de guet de D.C.A. mais au cours des années 1941, 1942, les occupants firent rehausser la tour par un mur de maçonnerie avec créneaux constituant un poste d’observation relié par de nombreuses lignes téléphoniques. A noter que ce poste avait été “vidé” par l’occupant le 15 août 1944 alors que 20 obus provenant d’un tank canadien atteignaient de plein fouet la partie surélevée, côté Route de Coquelles.
En réponse à une enquête de l’évêque d’Arras sur les églises paroissiales en juin 1967, Monsieur l’abbé Paul Haudiquet déclarait : “ L’église Saint-Martin de Sangatte bâtie il y a 100 ans (bénédiction de la première pierre, le 18 avril 1868 par Monseigneur Lequette).
Restauration pour dommages de guerre : état vétuste extérieurement, réparations importantes à entreprendre, pierres, moellons crayeux à changer au clocher, aux contreforts et aux chéneaux.”
Après plusieurs réparations infructueuses, il fut décidé, au conseil municipal réuni le jeudi 18 octobre 1979 que le clocher de l’église Saint-Martin de Sangatte serait détruit dans sa partie supérieure.
Le mardi saint 1er avril, les cloches s’envolèrent dans le ciel, soulevées par la grue et se posèrent délicatement sur le sol où leur support “beffroi” vint les rejoindre.
Les vitraux montés sur des supports en fer ont été détériorés sous l’action de la rouille. Plus riches en couleurs et plus précieux par les sujets représentés, les vitraux du choeur furent démontés, restaurés et replacés sur une monture en “métallisé.”
Les vitraux du choeur représentent : la naissance de Jésus, les disciples d’Emmaüs, la fraction du pain par Jésus, la résurrection du Christ au matin de Pâques. Les vitraux de la nef, complétement détériorés et sans grande valeur artistique remplacés par des verres neufs.
En l’honneur de Saint-Martin, patron de la Paroisse, le vitrail d’entrée à la hauteur de la tribune représente le jeune soldat romain, futur évêque de Tours donnant une part de sa chlamyde (4) à un pauvre à l’entrée d’Amiens (voir ci-dessous).
Le futur Saint-Martin, évêque de Tours est né en Pannonie (Autriche-Hongrie) vers 317 de parents païens. Il fut élevé en Italie. Dès l’âge de 10 ans, à l’insu de ses parents, il se fit inscrire parmi les catéchumènes pour connaître la religion chrétienne et se faire baptiser.
Son père, étant tribun militaire, Martin âgé de 15 ans, fut enrôlé de force dans l’armée romaine et il vint dans le nord de la Gaule.
Prés d’Amiens, en hiver, il partagea son manteau (chlamyde) pour en couvrir un pauvre qui grelottait sur le bord de la route. Jésus lui apparût, revêtu de cette chlamyde et lui dit : “Martin, encore simple catéchumène, tu as déjà la charité d’un chrétien”.
Baptisé peu de temps après, à 18 ans environ, il donna sa démission de l’armée pour se mettre au service de Dieu. Devenu l’ami de Saint-Hilaire, évêque de Poitiers, il établit à quelques kilomètres de la ville épiscopale un monastère. Son temps fut dès lors partagé entre la vie monastique et la prédication de l’évangile dans les campagnes où Martin lutta contre les idoles et les coutumes Païennes. Ses admirateurs l’emmenèrent par ruse à Tours où il fut nommé évêque. Il n’en continua pas moins à vivre dans la pauvreté et à s’adonner à la prière, se retirant souvent non loin de Tours dans le monastère de Marmoutier.
Son ardeur apostolique lui fit entreprendre de nombreux voyages à travers toute la Gaule et l’incita à construire des églises chrétiennes sur les ruines de temples païens . En novembre 397, en tournée pastorale pour régler un conflit, il rétablit la paix dans la communauté mais il mourût là dans sa 81e année. Ses funérailles furent célébrées le 11 novembre à Tours. En France, près de 4000 Èglises lui sont dédiées et 495 villages portent son nom.
GLOSSAIRE
(1) Feux : au sens utilisé aujourdíhui par l’INSEE , c’est à dire la réunion de plusieurs personnes, liées on non par les liens du sang, et vivant sous le même toit. Pour en déduire une indication de population, il faut donc évaluer le nombre de gens qui habitaient, à l’époque, couramment sous le même toit. Imaginons une famille de deux parents, deux enfants, et un nombre d’ascendants et de serviteurs tellement variable qu’il est difficile à déterminer par principe. Le feu constituait aussi un foyer fiscal au sens ou nous le connaissons aujourdíhui.
(2) La suppression de la dîme et la “mise à disposition de la nation des biens du clergé” (2 novembre 1790) exigent une redéfinition du statut de l’Eglise et de ses rapports avec l’Etat. Le 12 juillet 1790, est votée la constitution civile du clergé, d’inspiration gallicane, destinée à être intégrée à la constitution. L’organisation de l’Eglise est calquée sur celle du pays. Il doit désormais y avoir un seul évêque par département ; archevêques métropolitains, évêques et curés doivent être élus par des assemblées électorales. Chacun doit recevoir de l’Etat un traitement. Cette constitution civile du clergé est approuvée par le roi ,en l’état. Lasse d’attendre la consécration de la Constitution civile du clergé par le Pape, l’assemblée constituante exige des ecclésiastiques un serment de fidélité à la nation, le 27 novembre 1790.
Cette décision provoque une cassure profonde et imprévue. Bien que la majorité des membres du bas clergé soit pourtant acquise à la Révolution, l’Eglise est divisée par un schisme. Les prètres “constitutionnels” acceptent de préter serment, tandis que les “réfractaires” continuent à ne reconnaître que l’autorité suprême du Pape.
(3) Pinacle : clocheton sur le toit d’une église.
(4) Chlamyde : Manteau court et fendu.